Monsieur le Président de la République Française,
En menaçant de déchoir de leur nationalité certains Français délinquants d’origine étrangère, votre gouvernement et vous-même êtes revenus sur un article fondamental de notre constitution et pas des moindres, z'y va ! carrément le premier :
« La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion.(…) »
Cet article vise à empêcher un quelconque gugusse de mettre une partie de la population à l’index et, quand je dis à l’index, je fais dans la litote, vu que les derniers Français à avoir été déchu de leur nationalité dans ce pays en raison de leurs « origines, race ou religion » furent nos compatriotes juifs déportés par Vichy. Loin de moi l’idée de vous comparer au maréchal Pétain, je dis juste ce qui est.
Franchement, je ne sais pas si cette mesure aurait une quelconque utilité en termes de lutte contre la délinquance et franchement, je m’en moque : même si elle en avait une, ce dont je doute, je n’en voudrais pas. D’ailleurs, vous savez comme moi qu’elle sera retoquée par le conseil constitutionnel.
C’est bien ce que je vous reproche.
Monsieur le Président de la République Française, vous avez déjà suffisamment de jouets à votre disposition – dont un avion Air Force 1/2 - alors ne jouez pas avec les principes fondamentaux de la constitution française, s’il vous plaît. Même pour de faux. Même pour faire le mariolle auprès des électeurs de Le Pen, ça ne vaut pas le coup. C’est dangereux, je vous jure : ces trucs-là, on sait où ça commence, on ne sait pas où ça finit.
Ou alors si : ça brunit.
(Au passage, mes respects à votre dame)
Il ne faut pas croire que la liberté, ça soit un truc acquis, Monsieur le Président. La démocratie, ça doit être entretenu chaque jour. C’est un truc qui s’use, sinon. C’est comme une maison.
C’est notre maison. Il faut l’épousseter, l’entretenir, la réparer. Il faut la nettoyer souvent parce qu’il y a toujours des parasites qui finissent par s’y installer (surtout sous votre mandature).
Mais s’il y a bien un truc auquel il ne faut pas toucher, c’est les fondations. Parce qu’une démocratie, ça doit avoir des fondations stables, de bons murs bien épais, une porte et des fenêtres solides. Une bonne démocratie, ça doit pouvoir être solidement verrouillé de l’intérieur pour empêcher les cambrioleurs et les assassins d’entrer.
Et tout ça, ça s’appelle une constitution.
Alors, si vous laissez votre gouvernement remettre en cause, même verbalement, le principe d’égalité qui est au cœur de notre république, c’est comme si vous parliez d’ouvrir la porte de notre maison aux quatre vents. Ce serait la porte ouverte à tous les abus. A tous les cambrioleurs et à tous les assassins. Je ne dis pas qu’ils viendraient. C’est juste que je ne veux pas prendre le risque, j’ai étudié un peu l’Histoire. Ça commence tout doucement. Pile comme vous faites.
Alors, s’il vous plaît, Monsieur le Président de la République Française, ne touchez pas à ça. Vous avez déjà la police, la gendarmerie, le ministère de l’intérieur, la vidéo surveillance, les radars, les taser, les flashball, les banlieues et le ministère de l’Immigration et de l’Identité Nationale pour séduire votre électorat et lui faire oublier l'affaire Woerth.
Merci, c’est gentil.
Respectueusement.
Eric la Blanche
PS «Si tu es prêt à sacrifier un peu de liberté pour te sentir en sécurité, tu ne mérites ni l'une ni l'autre.» Thomas Jefferson